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Un café avec Étienne Cabaret musicien

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Le Mois du Film Documentaire démarre cette semaine et ce, dès mercredi soir à 20h30, avec la projection à l’Armor Ciné d’Erquy du ciné concert « Le Chemin de l’arc en ciel ». Réalisé en 2018 par Oona Spengler, ce film nous fait voyager dans l’œuvre du compositeur Alexandre Spengler au travers de ses lettres et de différents personnages représentant les thématiques poétiques qui habitent son travail. Pour en savoir plus, j’ai rencontré Etienne Cabaret, le clarinettiste du groupe Bêtep qui interprète la partition musicale de cette œuvre « totale ».

Maxime Moriceau : Peux tu m’en dire plus sur ce projet ? Déjà, que veut dire Bêtep, le nom de votre quatuor ?

Etienne Cabaret : Ça vient de l’écriture cyrillique du mot vent et ça se prononce Veter. On s’est formé en 2015 autour d’un premier répertoire et puis on a eu envie de travailler d’autres axes ensemble. Parallèlement, Oona qui est cinéaste avait l’envie, depuis plusieurs années, de travailler sur les œuvres de son grand-père, Alexandre Spengler. Il y avait beaucoup de partitions parmi lesquelles, une grande œuvre qui l’a habité en grande partie de sa vie : Le chemin de l’arc-en-ciel. Avec Bêtep, on a été sensible à ses arrangements jazz, à ce côté musique de chambre ou fanfare. On a voulu appuyer ce trait.

M.M : Il y a dû y avoir un travail d’adaptation, comment avez-vous procédé ?

E.C : C’était une œuvre pour orchestre symphonique. Nous avons travaillé avec Maël Oudin qui est compositeur, arrangeur et musicien. Nous avions déjà collaboré avec lui pour notre projet Moger Orchestra. Nous avons monté un quatuor à vent composé d’un tuba, d’un saxophone baryton, d’une clarinette basse et d’une flûte traversière. C’est une formation qui normalement n’existe pas en musique. Même s’il y a eu un gros travail d’adaptation, on a vraiment tenu à respecter l’œuvre et à suivre les partitions. On aime l’idée qu’Alexandre aurait apprécié d’être adapté dans une forme qui ne soit pas figée, lui qui a revisité si souvent ses propres arrangements.

M.M : Comment avez vous travaillé avec Oona ? La musique de film est souvent composée sur les images. Là, le film semble sortir de la partition.

E.C : C’est à peu près ça. On a pris la technique à contre pied. Déjà, faire un film muet avec les techniques modernes d’enregistrement, c’est assez particulier. Ensuite, le travail d’Oona a été de créer ce film à partir d’écrits et de musique. C’était sa matière de base pour concevoir le film. La difficulté était de les faire raisonner sans faire de doublon. Elle s’est beaucoup inspirée du journal de bord quotidien d’Alexandre dans lequel on trouve des thématiques fortes qui font de lui un personnage complexe.

M.M : Quelles sont ces thématiques et comment la réalisatrice a-t-elle décidé de les mettre en scène ?

E.C : En tant que documentariste, Oona s’est attachée à la philosophie de son grand-père, à ses passions et ses références mythologiques ou littéraires. C’était un passionné d’astronomie un peu mystique. Il menait une vie d’ascète et se déclarait le seul fidèle d’une religion qu’il avait inventé. C’était quelqu’un de très pieux mais pas vraiment religieux. Son rapport à la musique était sacré. On retrouve ces différentes facettes dans le film. Chaque personnage rencontré est comme un écho, une variation autour de la personnalité d’Alexandre Spengler.

M.M : Comment s’est fait le choix d’un narrateur sur scène avec vous ? Etait-ce pensé dès le départ ?

E.C : Les choses sont venues petit à petit. Le comédien Gabriel Dufay est un ami d’Oona. C’est pendant le tournage à Paris qu’ils ont fait des essais ensemble. Oona a sélectionné des extraits du journal de bord d’Alexandre et a choisi de les faire jouer comme les partitions. C’est comme ça que Gabriel est devenu la voix d’Alexandre. Tout le film s’est un peu composé comme ça. La dernière phase de montage était assez fascinante. On faisait des aller-retour entre la salle de montage et le studio d’enregistrement en apportant à chaque fois des modifications. Finalement, l’arrangement entre la musique, les textes et les images s’est fait collectivement. Maintenant, ça forme un tout.

M.M : Quelles suites donnez vous au projet en dehors de la soirée d’ouverture du Mois du Film Documentaire ?

E.C : Nous le jouons la veille, le 30 octobre au Grand Bleu à Carhaix et en mars prochain au cinéma La Belle Equipe de Callac. Après nous aimerions travailler sur une version encore plus complète avec d’autres partitions et de nouveaux textes.

Maxime Moriceau, 25/10/2018