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Un café avec Pauline Le Peculier Réalisatrice du film Ciné Searcus, un rêve collectif

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L’histoire d’une bande d’amis qui, en 2015, monte un spectacle qui va circuler de la Bretagne aux Antilles

Maxime Moriceau : Que désigne le collectif dans ton titre ?
Pauline Le Peculier : Le terme collectif parle du sujet du film. Le voyage a duré 3 ans et demi avec les amis et il y avait beaucoup de choses à raconter. Au départ, je mélangeais pas mal de choses. C’était à la fois un projet de voyage en famille avec un collectif et puis différents bateaux donc ça faisait beaucoup de mélanges. Pour ce film là, j’a voulu me centrer sur l’aspect collectif. Comment on a réussi à faire ensemble ces spectacles.

M.M : Quel est ton parcours de réalisation ?
P.L.P : A la base j’ai fait des études de cinéma à la fac de Rennes mais c’était très théorique, j’ai pas vraiment appris à faire de film. C’est plus tard en rencontrant Yann, mon compagnon actuel qu’on est parti faire un premier voyage en bateau pendant lequel on a projeté des films lors de nos différentes escales. Avec ma caméra, j’ai voulu raconter cette aventure et faire des films autour de ces voyages. Après ce premier film, quand on a eu un nouveau projet de voyage, j’ai tout de suite eu l’envie de faire un film sur le projet Ciné Searcus. L’originalité de ce voyage c’est qu’il m’a donné de nouvelles idées de films et qu’à partir de cette aventure, je vais monter un deuxième film qui ne va pas parler du projet mais plutôt de la partie famille. On a vécu différents moments avec le collectif et on savait que si on voulait que ça tienne il fallait faire des pauses. Donc on a parfois fait le voyage sans le projet Ciné Searcus et c’est ça que j’ai envie de raconter dans ce nouveau film.

M.M : Dans ton film, tu es à la fois devant et derrière la caméra, le tournage était donc lui aussi collectif ?
P.L.P : A la fin du voyage, il y a un quatrième bateau qui est arrivé avec Renault, son capitaine qui était caméraman de profession. Pour moi c’était une aubaine. On l’avait déjà rencontré au départ de Pontrieux mais il m’avait dit qu’il partait pour se couper de ce monde là suite à une mauvaise expérience de tournage. Malgré tout, il avait filmé notre spectacle aux Canaries et nous avait fourni une bonne matière. Puis il nous a suivi sur toute la tournée aux Antilles ce qui nous a apporté beaucoup parce que même si je portais le projet du film, j’étais aussi dans le spectacle, j’avais 2 enfants, il y avait beaucoup de choses à gérer donc je ne pouvais pas être tout le temps seule derrière la caméra.

M.M : As tu porté d’autres casquettes au fil du voyage ?
P.L.P : quand on navigue, on est forcément sur différents postes. J’ai été co-capitaine, mousse, instit’ pour les enfants. Ma caméra étant petite et maniable, je pouvais la prêter facilement, notamment sur les spectacles. Au début du voyage, je cherchais aussi des personnes pour garder les enfants donc c’était un moyen de rencontrer les gens.

M.M : Comment as tu financé ce projet sur autant de temps ?
P.L.P : le film a une vie atypique par rapport à d’autres films produits. Je suis partie avec l’envie de ce film. Je l’ai fait et c’est à mon retour que je me suis dit, mince, comment je vais faire pour le montage ? J’avais déjà fait un film donc je savais le boulot que ça représentait. J’ai été à la recherche de financements mais ça n’a rien donné car les aides à l’écriture quand le film est déjà tourné, c’est très compliqué. Pour mon second projet sur notre famille, j’ai quand même trouvé un producteur qui m’a dit que ça prendrait du temps de trouver des financements. Il m’a conseillé de faire Ciné Searcus en auto-production comme je me l’étais dit au départ. Pendant le premier confinement, j’ai fait un financement participatif qui a bien fonctionné, on a reçu un peu plus de 6 000€. J’avais passé déjà énormément d’heures pour gagner des clopinettes mais bon, c’est le lot de beaucoup de premier film. Et puis j’ai rencontré Julie Grossetête, réalisatrice et monteuse et on a travaillé par échange. Elle a bossé sur mon montage et j’ai bossé sur sa maison. Ce troc, il est à l’image du film parce que le spectacle a toujours été joué au chapeau, on s’est toujours arrangé avec le collectif.

M.M : et quelle a été la vie du film ensuite ?
P.L.P : l’accueil a été très bon, le public a trouvé le rythme agréable, les images très belles. On a vite sorti un DCP pour le diffuser en salle de cinéma et la projection sur grand écran m’a vraiment fait oublié que c’était un film de bidouille. Il pourrait avoir une visibilité plus grande avec un producteur mais là aussi, je fais, ce principe de plusieurs casquettes, je suis productrice, distributrice, monteuse je l’ai fait. En cherchant des dates, j’ai proposé le mois de novembre à certaines structures en sachant qu’il y avait le Mois du Doc et qu’ils pouvaient bénéficier de certains financements. Je suis passée de spectatrice du Mois du Doc à réalisatrice présentant son film dans ce cadre donc c’est une belle histoire.

M.M : On peut dire que cette expérience t’a confortée pour la suite ?
P.L.P : Oui ça valide en quelque sorte le fait que c’est possible d’auto-produire un film. Je vois d’autres réalisateurs qui sont produits mais qui ont de tout petits budgets et qui ne gagnent pas grand chose au final. Sur Ciné Searcus, j’ai réussi à ne pas trop perdre de billes grâce au financement participatif et au troc.

M.M : et tu as aussi édité un DVD et un livre ?
P.L.P : l’idée vient là aussi de mon premier voyage avec Yann. On tenait un site internet où on racontait toutes nos aventures. Ça faisait une belle matière et nos lecteurs nous incitaient à sortir un livre donc c’était vraiment en lien avec l’aventure collective. Et puis le film ne peut pas à lui seul relater toute l’histoire de ce voyage de plus de 3 ans donc le livre détaille plus les escales avec beaucoup de photos et de belles illustrations réalisées par une amie. Le livre peut servir pour accompagner les séances du film mais pas que. Il a été fabriqué par un ami en auto-édition mais le rendu est tellement pro que les libraires le vendent aussi. Donc il a sa vie propre et puis, il sera toujours raccord avec le deuxième film que je vais faire.

Retrouvez Pauline sur son site auxcinephilesdeleau.com ou sur l’une des deux prochaines séances de Ciné Searcus : dimanche à la médiathèque de Ploëzal et lundi au cinéma de Lannion